19 mars 2017

Conférence AHEAD 2017

Nissim Louis, conseiller, SESH, Université de Montréal. Traduit de l’anglais par Line Lajoie

Les professionnels qui œuvrent auprès des personnes en situation de handicap sont-ils prêts à travailler avec une nouvelle génération d’étudiants qui a grandi dans un monde rempli d’appareils électroniques et dont l’univers social évolue de plus en plus en ligne et au sein de réseaux? Quand j’ai vu cette année le thème choisi pour la conférence de l’association AHEAD, « Équité et excellence », j’ai réalisé que nous ne l’étions peut-être pas. Aujourd’hui, certaines universités se servent encore d’un modèle de prestation de services mis en place il y a cinquante ans. Les tentatives de réformes et de modernisation, morcelées dans le temps, se sont montrées, dans la plupart des cas, insuffisant pour combler l’écart grandissant entre les systèmes conventionnels, les exigences de la vie moderne et les divers groupes de nouveaux apprenants.

Les tendances actuelles montrent que le nombre d’étudiants cherchant des mesures d’adaptation s’est accru à une vitesse étourdissante et prend de plus en plus d’envergure. Cette croissance a ébranlé les fondations d’établissements reconnus avec une telle force que ces derniers ne peuvent faire autrement que de demeurer profondément perplexes. Comment les universités s’adaptent-elles ?

En réalité, dans ce contexte de droit à l’accessibilité, l’éducation de niveau postsecondaire n’a jamais été aussi accessible et libre d’obstacles, ou encore, étrangement, envahie par le doute, telle

qu’elle l’est aujourd’hui. Par exemple, l’année dernière, à l’Université York, dans une cause s’appuyant sur la jurisprudence relative aux droits de la personne, un étudiant a obtenu le droit d’avoir accès à des mesures d’adaptation sans qu’il ait eu à révéler la nature de son trouble. Cela change la donne !

Sur le sujet de l’accessibilité, des droits et de la mobilisation, il est de plus en plus difficile pour les universités de faire valoir leur rôle traditionnel de gardien de l’admissibilité. Dans le nouvel environnement de l’accessibilité universelle, il existe aujourd’hui des principes d’accessibilité dans le travail de conception. En ce moment, partout en Amérique du Nord, les personnes en situation de handicap s’attendent à participer et à s’intégrer pleinement à la société. Un système d’éducation accessible correspond à un environnement où les personnes en situation de handicap sont en mesure d’avoir accès à cet environnement et font            face, avec dignité et sans obstacle, aux mêmes responsabilités et exécutent les mêmes tâches que tout le monde.

Il vaut la peine de porter attention à certaines présentations faites et à certaines conversations tenues dans le cadre de la conférence AHEAD de cette année. Parmi celles-ci :

  1. Finies les notes (Notes No More. Cheryl Muller, M.Ed., University of Arizona)

Tout changement de paradigme dans l’offre de services aux personnes en situation de handicap conduit possiblement à une redéfinition des mesures d’adaptation. C’est justement ce qu’a fait le service de la University of Arizona avec son offre de prise de notes. À mesure que l’enseignement et la technologie évoluaient, certains ont questionné la pratique traditionnelle de la prise de notes comme mesure d’adaptation. Ils ont alors développé un cadre de travail pratique sur lequel se baser pour reconnaître si, selon le contexte, les notes sont en fait un outil d’aide à l’étude ou encore une réponse à un idéal inaccessible. Voici des points importants que j’ai retenus de la présentation et que je trouvais intéressants de partager.

  • Lorsqu’ils se sont adressés aux étudiants, de manière intentionnelle, pour connaître les raisons pourquoi ces derniers avaient besoin de notes, la majorité des réponses n’avait aucun lien avec un quelconque handicap.
  • Les outils d’enregistrement synchronisés et la disponibilité des documents pour tous les étudiants avant les cours magistraux contribuent aujourd’hui à rendre les cours accessibles.
  • Pendant une période de deux ans, soit de l’automne 2015 au printemps 2017, suivant l’évaluation du processus, l’Université a constaté une diminution de 60 % des demandes pour la prise de notes.
  • La raison de la diminution s’explique par une augmentation du nombre de cours qui intègrent un plan d’accessibilité au moment de la conception du cours.]
  1. Utiliser un modèle d’amélioration du processus afin d’accroître l’efficience et l’efficacité des services aux personnes en situation de handicap (Using a Process Improvement Model to Increase Efficiency and Effectiveness of Disability Services: Deanna Arbuckle, MRC, CRC, University of Dayton, Elizabeth Harrison, Ph. D., University of Dayton)

Avant de changer quoi que ce soit, il faut évaluer ce que nous faisons inadéquatement. Afin d’identifier les éléments problématiques relativement aux opérations, des collègues de la University of Dayton se sont servies du modèle simple d’amélioration du processus. Elles ont utilisé ce processus pour répondre efficacement aux besoins des étudiants et du corps professoral sans encombrer le personnel de processus inutiles et inefficaces. En utilisant ce modèle, elles ont réussi à accroître le niveau d’efficacité et l’efficience des services de soutien aux personnes en situation de handicap.

  1. Est-ce que votre lettre pour des mesures d’adaptation fait tomber des barrières ou au contraire, crée des obstacles?

(Does Your  Accommodation  Letter  Remove Barriers or Create Obstacles? Adam Meyer, Ph.D., University of Central Florida,Margaret             Camp, M.Ed., Clemson University)

Cette présentation a fait le survol des considérations dont on doit tenir compte pour encadrer la communication par écrit proposant une mesure d’adaptation.  Selon les conférenciers, l’accessibilité en contexte d’apprentissage doit prendre en considération l’étudiant (et la nature de son handicap ou de son trouble), les obstacles environnementaux, les éléments essentiels du cours et des mesures raisonnables d’adaptation, lesquelles sensément reconnaissent chacun de ces aspects. Cependant, les processus initiaux d’évaluation amorcés par le service aux personnes en situation de handicap

et les communications adressées subséquemment par l’entremise d’une lettre proposant une mesure d’adaptation peuvent omettre d’identifier chacune de ces variables, ce qui pourrait contribuer à créer des obstacles. Cette présentation très intéressante touche les pratiques courantes relatives aux composantes des lettres proposant des mesures d’adaptation.

  1. Obligation d’assiduité (Being There: Jamie Axelrod, M.S., Northern Arizona University, Jane Jarrow, Ph.D., Disability Access Info Support)

Combien d’entre nous sont confrontés à des problèmes de délai pour réaliser un travail ou l’obligation d’assiduité? Lorsque l’obstacle que doit surmonter un étudiant touche à des obligations énoncées dans le plan de cours, quelles approches doit-on privilégier? Des collègues de la University of Northern Arizona ont partagé des questions très intéressantes à se poser d’entrée de jeu afin de proposer des mesures d’adaptation raisonnables.

  1. Accueil c. Interview : Appliquer le modèle de consultation appréciative au processus d’adaptation. (Intake vs. Interview: Applying the appreciative advising model in the accom modation process. Grace Moskola, M.A., Rollins College

Voici une façon alternative d’évaluer les besoins d’un étudiant dans un cadre accueillant et réceptif. Le modèle de consultation appréciative AA (Appreciative Advising), développé par Jennifer L. Bloom, s’appuie sur un questionnement positif de recadrer la façon dont les conversations de nature critique sont tenues et vise à habiliter les étudiants à faire leur propre cheminement vers la réussite. La présentation décrit les principes du modèle AA et comment le personnel des services aux étudiants en situation de handicap peut les mettre en pratique dès une première rencontre avec un étudiant.

  1. Déterminer les mesures d’adaptation applicables aux modules en milieux cliniques et en laboratoire des programmes en santé. (Determining accommodations for Lab and Clinical Components  in   health   programs. Stefanie C. Silvers, Ed.S., St. Petersburg College, Dr. Eric Carver, Provost, Health Ed. Center, St. Petersburg College)

Le nombre d’étudiants en situation de handicap dans les programmes de santé continue de croître. Conséquemment, les établissements d’enseignement doivent avoir un processus clair et interactif quant aux mesures d’adaptation à mettre en place en milieux cliniques et en laboratoire. La présentation propose un modèle inhérent au processus interactif, décrit les facteurs à considérer ainsi que le mode de détermination des mesures d’adaptation et suggère des façons pour communiquer cette information convenablement aux étudiants.

  1. L’adoption de mesures d’adaptation raisonnables en milieu clinique. (Clinical Accommodations:    Determining reasonable    clinical    accommodations: Jan Serrantino, Ed.D., University of California, Irvine, Elisa Laird-Metke, J.D., Samuel Merritt University)

Cette présentation portait sur les défis particuliers qui se posent relativement à l’adoption de mesures d’adaptation en milieu clinique, lesquelles peuvent être hautement spécialisées ou marquées de nuances. Les présentateurs ont parlé de planification proactive et de partenaires de collaboration et ont fait la promotion des meilleures pratiques relativement à l’adoption de mesures d’adaptation en milieu clinique.

J’aimerais remercier l’AQICESH de m’avoir donné l’occasion de participer à la conférence AHEAD de cette année. J’espère que ce sommaire vous aidera à repenser vos pratiques courantes et vous préparera à relever les défis et saisir les occasions qui se présenteront à vous à l’avenir.